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Le cumul déontologiquement discutable de Cédric Villani

Intelligence artificielle 


Nos collègues Dominique Gillot et Claude de Ganay ont rendu au mois de mars dernier, sur l’initiative de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, un copieux rapport sur l’intelligence artificielle. Sans que le bilan qu’ils dressent et les perspectives qu’ils proposent aient été réellement discutés, le Gouvernement a demandé à M. Cédric Villani un nouveau rapport sur le sujet, moins de six mois après le dépôt du précédent.

Publiée par Pierre Ouzoulias sur Jeudi 26 octobre 2017

M. Cédric Villani est par ailleurs président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques : vous nous permettrez par conséquent de nous interroger sur le bien-fondé de ce cumul, qui nous semble déontologiquement discutable.


À l’occasion des nombreux entretiens qu’il a eus avec la presse, M. Cédric Villani défend une approche globale de l’intelligence artificielle et, sur ce sujet, nous ne pouvons que partager son point de vue. Il nous semble, en effet, que ce dossier ne peut être dissocié des difficultés rencontrées par la culture mathématique, singulièrement par son apprentissage scolaire.


Pour n’en donner que quelques exemples, je rappelle qu’un quart des collégiens ont des difficultés en mathématiques. Pis, sur les 1 440 postes ouverts au CAPES de mathématiques, 375 sont restés vacants. De nouveau, cette année, depuis la rentrée, nous entendons dans nos départements la récurrente plainte des familles exaspérées par le non-remplacement des professeurs, qui touche principalement les disciplines scientifiques. Ne pensez-vous pas qu’une stratégie efficace en matière d’intelligence artificielle devrait en tout premier lieu renforcer la culture scientifique dans l’enseignement ?


Par ailleurs, le rapport de Dominique Gillot et Claude de Ganay faisait justement apparaître la nature essentiellement masculine de la recherche en intelligence artificielle. Environ 90 % des programmeurs et des développeurs sont des hommes. Pourquoi les femmes sont-elles exclues à ce point de ces disciplines ? Par quel processus mystérieux l’intelligence féminine ne pourrait-elle pas se développer dans le domaine de l’intelligence artificielle ? (Mme Marie-Pierre Monier applaudit.)


M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.


M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé du numérique. Monsieur le sénateur, j’aborderai deux points que votre question a soulevés et qui sont essentiels et conjoints : d’une part, la diversité des profils, qui passe par la culture et la sensibilisation, et, d’autre part, une pédagogie des sciences et des techniques, qui doit commencer très tôt en France.


En une dizaine d’années, on a quasiment vu disparaître 100 % des programmes audiovisuels consacrés à la pédagogie des sciences et du numérique, que ce soit sur les chaînes publiques ou sur les chaînes privées.


Voilà trente ans, vingt ans ou quinze ans, quand j’étais moi-même un jeune enfant, plusieurs programmes de sensibilisation étaient proposés, qui trouvaient un écho à l’école, les professeurs pouvant les réutiliser. Au fur et à mesure, on n’a plus parlé de sciences, de mathématiques ; on a fait des exercices de mathématiques et de sciences et on a perdu ce goût heureux de la pratique sensible des sciences et des techniques. Résultat, ces sujets ont été réservés aux experts et à quelques-uns.


Vous avez rappelé les enjeux de la formation mathématique en France. Aujourd’hui, l’un de nos plus gros problèmes, c’est le nombre de candidats. Les professeurs de mathématiques ne demandent pas plus de nouvelles formations, ils demandent à les remplir !


Ce problème commence très tôt. Vous avez pris l’exemple des femmes : dès le début, on exclut, on ne cherche pas à inciter tout le monde à se diriger vers les sciences et à regarder avec amour cette discipline.


Il n’est qu’à voir la politique culturelle des sciences ! Paris compte le Palais de la découverte et, dans le XIXe arrondissement où j’ai été élu, la Cité des sciences et de l’industrie. Dans tous nos territoires, nous avons des musées des sciences. Pourtant, ils ne sont pas particulièrement remplis.


Quelques pays font un peu mieux que nous sur la place des femmes dans le numérique et dans les sciences. Ils ont traité cette question depuis le collège. Pour le ministre de l’éducation nationale et moi-même, l’enjeu consiste à faire très tôt la démonstration à nos jeunes que les sciences et techniques constituent un avenir potentiel pour eux.


Je vous invite à m’accompagner au prochain événement StartHer. Celui-ci ne rassemble que des femmes, mais nous y avons parlé non de femmes, mais de technologies et de la façon dont celles-ci sont en train de transformer le monde par la technologie. C’était un moment fabuleux !