Depuis 2014, la dépense moyenne par étudiant a baissé de 1,4% tous les ans, quand dans le même temps, elle est restée stable pour les élèves des classes préparatoires.
Nous n'aurons pas d'avenir si nos universités restent maltraitées.
40 % des étudiants qui vivent seuls sont en situation de pauvreté.
Pendant la crise sanitaire, ils avaient été privés de leur travail. Aujourd’hui ils subissent avec une grande violence l’inflation et l’augmentation des prix de l’énergie.
Le ministre du logement annoncé ce 28 novembre le volet « Logement » du Conseil national de la refondation. Je regrette que des trois thématiques retenues aucune ne traite du logement étudiant. Les universités et les étudiants ne peuvent plus être systématiquement ignorés des politiques sociales. Ils doivent être placés au cœur des ambitions de l’État.
Monsieur le Président,
Madame la ministre,
Mes chers collègues,
La France délaisse ses universités. Pour s’en convaincre, il suffit de présenter quelques chiffres. Depuis dix ans la dépense moyenne par élève a augmenté de 1,5 % par an pour le premier degré et de 1,2 % par an pour le second degré. Cette progression continue s’explique par la conjonction de la stabilité des moyens budgétaires et de la baisse des effectifs. Le processus est inverse pour les universités qui ont dû accueillir, durant la même période, un demi-million d’étudiants supplémentaires à budget constant. Ainsi, la dépense moyenne par étudiant a baissé en moyenne de 1,4 % tous les ans, depuis 2014. En revanche, elle est restée stable pour les élèves des classes préparatoires aux grandes écoles qui bénéficient, en 2021, de 16 370 euros per capita, contre 10 270 euros pour les étudiants, soit une différence de plus de 62 %.
Le choix politique des Gouvernements successifs de ne pas financer l’augmentation des charges de service public des universités les conduit aujourd’hui à une situation de quasi banqueroute. D’autant plus, que s’ajoute à ce déficit structurel des surcoûts énergétiques colossaux et, à moyen terme, des incertitudes sur la compensation par l’État de la revalorisation du point d’indice du traitement des fonctionnaires et du glissement technicité vieillesse. Il serait très préjudiciable à la qualité pédagogique des enseignements et à la réussite des étudiants que ces apories budgétaires aient finalement pour conséquence de nouvelles régressions des taux d’encadrement.
Les universités, comme les collectivités, sont en quelque sorte placées sous la curatelle budgétaire de l’État pour assurer leurs missions de services publics. Cette dépendance accrue est la conséquence du conflit entre la hausse de la démographie, le principe constitutionnel d’égalité d’accès des étudiants à l’université et l’inadéquation des dotations de l’État. Cette striction malthusienne induit une recentralisation de la maîtrise budgétaire au profit des administrations et, à terme, la fin de l’autonomie des universités. Quel sens peut avoir le dialogue stratégique et de gestion si l’État ne leur donne pas les moyens budgétaires de satisfaire leurs fonctions d’intérêt général ?
À l’origine de cette carence organisée, il y a le calcul budgétaire de Bercy qui considère que la baisse attendue de la démographie estudiantine redonnera des marges budgétaires aux établissements. Je ne partage pas cette projection stratégique, car elle ignore les objectifs d’une baisse du taux d’échec en licence et d’une hausse de celui de la poursuite des études universitaires. Comme je l’ai déjà défendu à cette tribune, notre pays doit davantage mobiliser l’Université pour satisfaire l’impérieuse nécessité d’un besoin accru de connaissance.
Par-dessus tout, cette contrainte budgétaire méconnait la situation matérielle dramatique des étudiants. La banalisation de la pression épidémique n’a pas mis un terme à la précarité estudiantine, au contraire elle en révèle davantage ses causes structurelles. Le ministère des solidarités estime que 40 % des étudiants qui vivent seuls sont en situation de pauvreté. Pendant la crise sanitaire, ils avaient été privés de leur travail, aujourd’hui ils subissent avec une grande violence l’inflation et l’augmentation des prix de l’énergie.
Comme l’avait établi le rapport de la commission de la culture réalisé sous la conduite de son président, la résorption de la précarité étudiante demande un plan pluriministériel associant aussi les collectivités. Une réforme des bourses ou l’instauration d’un revenu étudiant ne résoudront pas complètement les fortes disparités des situations régionales. Ainsi, il est absurde de concentrer l’offre d’études supérieurs dans les métropoles alors que ces villes sont soumises à une pression sans cesse accrue de demande de logements. Dans de nombreuses régions, le premier poste de dépense des étudiants est le logement. Il est donc urgent d’en relancer la construction.
Le ministre du logement annoncera aujourd’hui le volet « Logement » du Conseil national de la refondation. Je regrette que des trois thématiques retenues aucune ne traite du logement étudiant. Les universités et les étudiants ne peuvent plus être systématiquement ignorés des politiques sociales. Ils doivent être placés au cœur des ambitions de l’État.